


DÉNOMINATION
HISTORIQUE
Période
seconde moitié du XXe siècleAnnée(s) de réalisation
1970Commanditaire(s)
Société des Écus, Germain-Louis Viala promotion immobilière (première tranche) Société bordelaise d'études et de réalisations immobilières (seconde tranche)Concepteur(s)
agence d'urbanisme et d'architecture 33 (André Bersagol, Claude Bouey, Pierre Calmon, Pierre Mathieu, Roger Tagini)A GRANDS TRAITS
En lieu et place de garages, le promoteur immobilier Germain-Louis Viala (1924-2017) fait construire le plus haut et le plus vaste immeuble privé de la région bordelaise : le Viala-Wilson.
Il est se compose de deux immeubles correspondant à deux tranches distinctes et rapprochées : la première est confiée à la fin des années 1960 à l'AUA 33 (agence d'urbanisme et d'architecture) avec Pierre Calmon comme architecte d'opération. À peine inauguré en janvier 1973 par le maire de Bordeaux Jacques Chaban-Delmas que le Viala-Wilson est complété par le Viala-Wilson 2, un immeuble accolé et indépendant de 10 travées mis en chantier dès 1974.
DANS LE DÉTAIL
L'ensemble forme une barre de béton blanc, longue de 38 travées et haute de 9 étages, dont le dernier est en attique. La façade principale est composée d'une trame unique et régulière, chaque fenêtre à embrasure étant traité comme une alvéole pour rappeler la fonction de bureau.
À l'arrière, un espace de bureaux en rez-de-chaussée est ouvert par trois patios est complété par un parc arboré et un parking.
Un peu beaucoup (!) de Montréal à Bordeaux
Les trames régulières, la préfabrication des éléments de façade en béton, la teinte claire générale de l’immeuble sont des principes à ce point acceptés, intégrés dans le paysage urbain bordelais, qu'il est possible d'en oublier - ou d'en méconnaître - les références architecturales, parfois lointaines.
Lorsque les architectes de l’aua 33 (agence d’urbanisme et d’architecture 33, composée de Roger Tagini, Claude Bouey, André Bersagol, Pierre Mathieu et Pierre Calmon), sont sollicités par le promoteur immobilier Germain-Louis Viala pour la construction du plus grand immeuble de bureaux de Bordeaux, ils puisent leur inspiration outre-Atlantique, dans la ville canadienne de Montréal.
En effet, des photographies retrouvées dans le dossier de l'agence conservé aux Archives de Bordeaux Métropole montrent l’immeuble du 5 Place Ville-Marie à Montréal comme base de leur inspiration. Ce bâtiment fait partie de l’opération de renouvellement urbain du centre ville de Montréal orchestrée par le promoteur new-yorkais William Zeckendorf au milieu des années 1950. Celui-ci se charge de « boucher » le trou de l’ancienne gare centrale pour y installer un ensemble immobilier d'envergure composé de bureaux et de commerces. Zeckendorf fait appel aux architectes associés Ieoh-Ming Pei et Henry N. Cobb qui proposent une tour cruciforme de 47 étages (188 m) complétée d'immeubles satellites de moindre hauteur, le tout relié par une esplanade et des espaces souterrains. Le chantier s’étale de 1958 à 1962 pour la tour principale, et de 1964 à 1967 pour l'immeuble du 5, confié à une agence associée, l'ARCOP (composée des architectes Affleck, Desbarats, Dimakopoulos, Lebensold, Michaud & Sise). Les architectes revoient le projet selon leur dernière création remarquée à quelques encâblures de là sur le campus de l’université McGill : le pavillon Leacock (1963-1965), rectangle scandé en façade d'éléments de béton préfabriqués. Pour l'immeuble du 5, ils ouvrent le rez-de-chaussée sur tout son pourtour par des arcades, invitant le public à entrer. Les 14 étages du quadrilatères sont uniformes de fenêtres habillées par des éléments de béton préfabriqués aux profils prismatiques pour animer les façades. Le ton pierre donné au béton permet de contraster avec la tour centrale en aluminium et de réaliser une transition avec la ville du XIXe siècle environnante. L’immeuble est inauguré en 1967.
Ce sont tous ces détails architecturaux et principes constructifs que Pierre Calmon et l'équipe de l'aua 33 dupliquent pour l'immeuble Viala-Wilson. Même si les échanges avec le promoteur s'attardent sur la capacité des ascenseurs et la préservation des grands arbres à l'arrière, ce nouvel immeuble de standing marque incontestablement le paysage des boulevards bordelais dès son inauguration au début des années 1970. La société de Germain-Louis Viala affirme le également la prise d'un nouveau virage immobilier habituellement dévolu au logement haut de gamme (Le Viala-Turenne, 1969-1972).
Côté conservation, l'opération canadienne est reconnue et protégée depuis les années 2000 par les autorités culturelles locales comme "exemple exceptionnel du patrimoine moderne", cela n'a pas empêché l'évolution de l'immeuble du 5 dont les façades en béton ont disparu derrière un mur-rideau de verre en 2004. Quant au Viala-Wilson, il poursuit sa destination tertiaire et conserve, au fil des décennies, son intégrité architecturale et paysagère au cœur de Bordeaux.